Peux-tu te présenter en quelques mots?
Je m’appelle Hélène, j’ai 42 ans et je suis éducatrice de jeunes enfants en création de MAM (Maison d’Assistante Maternelle) dans le Finistère.
J’ai travaillé 16 ans dans le secteur du handicap. J’ai été interpellée par le fait que les jeunes d’IME (Institut Médico Educatif) faisant des stages en secteur adulte se retrouvaient complètement démunis car les signes ou les images utilisées pour communiquer étaient différents d’un établissement à l’autre (même au sein de la même association) ce qui m’a amené à intégrer un groupe de travail associatif sur la communication non verbale…. Première approche.
Peux-tu nous dire comment tu as découvert le langage des signes pour bébé?
Quelques années plus tard ayant quitté le secteur du handicap pour celui de la petite enfance j’ai découvert le « bébé signeur » au sein d’une structure où je travaillais.
Comment as-tu appris les signes?
Les professionnelles venaient juste de suivre une formation à mon arrivée, j’ai donc pris le train en route, appris les signes avec elles mais aussi et surtout avec les enfants que j’accompagnais.
As-tu un secret à dévoiler pour impliquer les parents dans cette belle aventure?
Je signais avec les enfants au quotidien et souvent les parents venaient vers moi car leurs enfants signaient mais ils ne comprenaient pas forcément. Je me suis toujours montrée disponible pour ceux qui le souhaitaient afin de les guider dans le « bébé signeur ». La structure a également mis en place une soirée sur le thème du signe. Nous avions filmé les enfants dans leur quotidien à la crèche sur plusieurs semaines.
Beaucoup de parents étaient émus de voir les enfants communiquer avec nous mais également entre eux par le biais du langage signé.
Je leur ai proposé d’apprendre ensemble les comptines les plus plébiscitées par les enfants afin qu’ils puissent les partager ensemble, à la maison. Le caractère ludique de l’atelier a très bien fonctionné.
Cela a motivé beaucoup de parents à s’y mettre à la maison.
1 ou 2 anecdotes du quotidien par dessus et les parents se montraient intéressés et motivés par l’idée de pouvoir comprendre ce que leur tout jeune enfant avait à leur dire.
Comment le langage des signes pour bébé a changé le quotidien en crèche?
Signer en crèche permet, en plus de la fonction première évidente qui est la communication, de diminuer largement le volume sonore du groupe ! Pour signer il faut être proche, disponible uniquement pour cela, on se regarde, c’est de l’écoute attentive …
Lors des conflits, les plus âgés n’hésitent pas à signer les règles aux plus jeunes et ils sont attentifs à être compris de l’autre. Rien que le fait de se concentrer pour signer fait déjà redescendre la tension entre eux.
Signer ses peurs, ses colères, ses joies, en bref toutes ses émotions permettent à l’enfant de bénéficier d’une écoute et d’un accompagnement répondant sur mesure à son problème ou son envie du moment. C’est un réel outil pédagogique pour les professionnels de la petite enfance.
Selon toi, quelle est la plus grosse difficulté quand on se lance dans le langage des signes pour bébé?
Je pense que pour l’adulte professionnel de la petite enfance, la plus grosse difficulté est de dépasser la « peur de faire devant les autres » . Une fois balayée la timidité naturelle que l’on peut avoir, ce n’est que du bonheur : je n’ai pas rencontré de difficulté particulière. Il m’est arrivé de demander aux plus âgés du groupe « peux tu me montrer comment se signe ….. ? » Cela renforce la relation adulte-enfant, cela donne lieu à des situations de partage privilégiées.
Quel est ton meilleur souvenir avec le langage des signes pour bébé?
Mes meilleurs moments sont les comptines signées.
Quand les enfants signent avant vous et que les plus âgés s’appliquent à montrer les signes aux plus jeunes.
Peux-tu partager avec nous quel a été le premier signe d’un bébé que tu accompagnais et ce que tu as ressenti à ce moment là?
C’était le temps du goûter. Une petite fille de 10 mois mangeait un pain des fleurs (bio) après son yaourt. Quand elle a fini elle m’a signé « encore » … Bon ben elle a eu le droit à un autre morceau, obligé ! Je crois que j’étais plus fière qu’elle de cette communication instaurée.
A quel âge as-tu commencé à signer avec bébé et à quel âge a-t-il fait son premier signe?
En structure je signe avec les bébés dès le départ par les comptines notamment, ensuite comme je signe avec les plus âgés, les bébés sont baignés immédiatement dans ce mode de communication.
Comment a réagi ton entourage quand tu leur a dit que tu allais signer avec des bébés ou qu’ils t’ont vu signer pour la première fois?
Quand j’ai intégré cette structure j’avais 2 ados et 1 pré ado. Je leur ai expliqué et à la maison tout le monde s’est mis à signer pour me soutenir dans mon apprentissage. Cela reste aujourd’hui notre mode de communication à distance (dans les festivals, si nous sommes à l’opposé d’une pièce bruyante…)
Qu’est-ce qui t’a le plus surpris dans ta pratique du langage des signes pour bébé?
Je m’étais intéressée au sujet de loin pendant ma formation. J’étais déjà convaincue du bien fondé de ce mode de communication mais j’ai été littéralement « scotchée » en le pratiquant au quotidien. Cela devient extrêmement rapidement naturel de signer, cela résout bien des « soucis » du quotidien : expression des émotions, des frustrations, fatigue, envies ou non envies …etc… Je suis encore plus convaincue aujourd’hui que je ne l’étais il y a 2 ans.
As-tu un dernier conseil à donner aux parents qui nous lisent?
Lancez vous !! Commencez par les signes avec lesquels vous êtes le plus à l’aise (4 ou 5) et une fois qu’ils sont naturels et bien intégrés dans votre quotidien élargissez le panel.
Le signe est parfois un peu mal reproduit ce n’est pas grave, l’essentiel c’est de se comprendre, de pouvoir communiquer avec son bébé. Soyez juste attentifs à verbaliser en même temps que vous signez. Je suis convaincue que ce mode de communication renforce le lien d’attachement parent-enfant, permet d’avoir une relation privilégiée et un sentiment de satisfaction chez l’enfant qui se sent compris.
Comment les lecteurs peuvent en savoir plus sur toi?
Je suis actuellement en projet MAM dans le Finistère. Cette MAM pratiquera bien entendu le bébé signeur au quotidien. Vous pouvez suivre notre aventure sur notre page facebook : MAM Ty Kanevedenn
As tu un conseil pour balayer la timidité de signer quand on est adulte ?
Quand on est adulte, je crois qu’il faut d’abord se dire que c’est pour l’enfant qu’on le fait, pour lui permettre d’être entendu et compris et pour renforcer notre relation duelle. Ca permet de relativiser sur la peur de « honte de mal faire » qu’on peut tous avoir à l’âge adulte. Et puis prendre tout cela avec humour, ne surtout pas « se prendre la tête » sinon cela risque d’être compliqué.